Beez s'étend sur la rive gauche de la
Meuse, en aval de Namur. Le dessinateur a pris son croquis depuis le
promontoire rocheux de l'autre rive, ce qui permet de saisir du regard, à
droite vraisemblablement Brumagne, le cours sinueux du fleuve, le village
lové au creux d'un méandre, comme dans la réalité et, à
l'arrière-plan, devant les collines boisées, les trois anciens sommets
caractéristiques des "Grands Malades". Il ne montre pas
l'île - aujourd'hui disparue - couverte d'osières et de prés sur
lesquels le curé de Lives possédait la dîme. Elle était située,
pourtant, entre Lives et Brumagne. En 1580, un moine de l'abbaye de
Boneffe s'y était noyé, lors de l'attaque, "détroussement et
ravissement" par les brigands, de le "nef marchande" de
Namur à Huy.
En revanche, Montigny peint une chapelle, au centre du village : grosse
tour carrée avec ouvertures percées au dernier étage sous un toit en
bâtière; nef de trois travées flanquée du côté visible de deux
chapelles avec fenêtres, choeur moins élevé que la nef et le chevet
plat. Cet édifice doit être sorti de son imagination car il n'y
eut jamais, avant le XIXe siècle de |
"Beez" - Vue prise
du sud, depuis les rochers de Lives.
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chapelle canoniquement reconnue à Beez, qui dépendait au
spirituel de Lives. Il est possible que le dessinateur ait
simplement exagéré les dimensions d'un oratoire dont le souvenir se
serait perdu. C'est ce qui expliquerait, dans un cas comme dans
l'autre, l'erreur d'orientation du choeur et la petite taille de la croix.
Des maisons basses au lourd toit de chaume sont groupées à quelque
distance du fleuve, auprès de l'enclos du cimetière. Au début du
XVIIe siècle, on comptait une vingtaine d'habitations taxables avec
jardins et pièces de terre attenantes. Il y avait au moins uns
cense, encore de torchis et couverte de chaume. Elle appartenait au
"docteur" Ronnet , de Namur, qui la faisait vaoir en
métayage. Le blé qu'il en tirait lui était envoyé par
barques. Clause curieuse de ce bail conclu en 1602, encore que
relativement courante à l'époque, le censier était tenu d'offrir,
chaque année à Noël, à l'épouse de son propriétaire, une livre de
poivre et autant de gingembre !
L'exploitation de la carrière des "Grands Malades",
l'établissement de la ligne de chemin de fer Namur-Liège et surtout la
construction de l'autoroute de Bruxelles vers les Ardennes, qui franchit
précisément la Meuse au viaduc de Beez, ont complètement défiguré le
paysage. (1)
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