Beez au fil des temps |
Observations sur le village autrefois |
Une excursion à Beez au début du siècle |
Nous voilà dans la gare de Namur pour prendre, dans la
gare latérale, le train "Huy-Liège ordinaire" qui nous conduira
à Beez. Nous voyageons maintenant sur la ligne du Nord-Belge et nous devons nous grouper par dix dans de petits compartiments. Le train nous conduit d'abord à travers des dépôts de charbon, des gazomètres, des usines de toutes espèces dont les bâtiments tout noirs attristent le pays. Ah ! par l'autre portière on aperçoit la Meuse ! C'est mieux ! Le large fleuve qui roule majestueusement ses eaux moirées suffit à donner du caractère au paysage. Enfin nous sortons de l'entassement des maisons : voici des jardins, des vergers remplis de beaux arbres fruitiers, surtout des pruniers : à l'époque de la floraison c'est un vrai champ de neige, étincelant de blancheur. |
A gauche, la vallée se rétrécit : au lieu des pentes légèrement inclinées sur lesquelles s'étagent, près de Namur, des jardins en terrasses, apparaissent des rochers dont les blocs blanchâtres émergent de la verdure. Puis nous arrivons près d'une masse calcaire à parois verticales, dont les blanches falaises bordent étroitement la Meuse. Ce sont les "Grands Malades" qui doivent leur nom à un hospice spécial établi à leur pied, au XIIème siècle, pour le traitement des lépreux, les grand malades. |
Un peu plus loin, de vastes fours à chaux engloutissent la roche que l'on entaille sans pitié. En face, la vallée reste largement ouverte et par delà les prairies et la double rangées d'ormes ombrageant la route, l'oeil se pose sur les courbes harmonieuses des mamelons enveloppés de taillis à l'épaisse verdure, d'où s'élancent de grands arbres. Nous descendons à Beez et nous retrouvons sur le terre-plein devant la gare. La route blanche descend de la gare vers la Meuse. |
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En face, sur l'autre rive, émergeant de la verdure, les rochers de Lives présentent leur masse calcaire avec les stratifications horizontales si frappantes. Nous tournons à gauche et après avoir longé pendant quelques centaines de mètres les haies d'aubépine qui clôturent les jardins du village, nous arrivons devant une prairie. Une prairie des bords de la Meuse, en juin ! Ces mots évoquent dans la pensée une richesse de flore inouïe, une confusion de parfums qui grisent et font battre le coeur plus vite. Près du sol, l'herbe est encore bien fraîche; de ces touffes vertes s'élèvent les hampes florifères déjà dorées des graminacées en fleurs. Et que de fleurs ! Mais il est impossible dans ce fouillis de saluer chaque fleurette par son nom. Les yeux se brouillent : ils n'aperçoivent que les contrastes des couleurs si vives et qui s'harmonisent pourtant : ils ne voient plus que le remous de la prairie qui ondule sous la brise, et qui s'argente sous la caresse du soleil. Des papillons aux larges ailes ajoutent leur grâce à celle des corolles, et des milliers d'insectes voltigent sur les fleurs à la recherche du nectar, se faisant les intermédiaires inconscients des fécondations croisées qui fortifient la race. |
Le chemin cendré à disparu, faisant place à un tout petit sentier qui côtoie la Meuse et zigzague au bord de la prairie. Voici des polygonum amphibium. Entre les pierres qui garnissent la berge, leurs tiges sont dressées; dans la Meuse, elles flottent au fil de l'eau; tantôt dans le ballast de la voie du chemin de fer, nous verrons des individus avec des tiges couchées. |
La prairie est superbe; elle tenterait irrésistiblement les animaux herbivores si on n'avait pris la précaution de l'entourer d'une ronce artificielle. Nous sommes arrivés au bout du sentier sur lequel nous cheminions. Autour de nous, partout de l'eau. N'avons-nous pas l'air d'être en pleine Meuse, à l'extrémité d'une île ? Mais nous avons tout simplement atteint ce promontoire terminant la longue terre qui s'étend entre la Meuse et le port de refuge, créé à Beez il y a une vingtaine d'années. Tournant à gauche, nous longeons toujours la prairie fleurie et nous arrivons dans un chemin resserré entre le port de refuge et le talus d'un immense tas de cailloux roulés, déposés là sans doute au cours des travaux ou après des dragages. Toute la flore de la vallée de la Meuse s'y est donné rendez-vous. Nous contournons le port de refuge pour suivre à nouveau la rive de la Meuse, et nous restons émerveillés devant la richesse de la végétation. Nous prenons alors la route qui s'étend toute droite vers Marche-les-Dames. (1) |
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J. BARZIN, Excursions Scientifiques sur les bords de la Meuse, Bruxelles, Lamertin, 1911, pp. 66-73 |
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Les textes et photos des pages
"Histoire" sont extraits du livre "Beez au fil des
temps", écrit par Pol Maquet. |
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Dernière mise à jour 31-déc.-2004 |
Conception : Pierre Bollen |